Un très beau nom pour une des plus vieilles fermes de Rhode
Texte écrit par : Christian Nekkebroeck
Brève histoire de la ferme
La ferme vers 1920 - Source : collection Dominique Olivier - Colorisée artificiellement en 2021
Les premières traces de l’existence de cette ferme datent de 1640, ce qui correspond par hasard au code postal de Rhode.
La forêt de Soignes s'étendait à cette époque bien au-delà de la ferme. Elle consistait en une habitation avec grange et étables. Elle était située tout près de la source du Kwadebeek et était entourée de champs, de prairies avec arbres fruitiers et de bois.
Pieter de Verwer fut le premier fermier mais faute d'argent, sa veuve Katarina de Becker dut quitter la ferme dès 1655 - en plus du mobilier il y avait 4 chevaux, 6 vaches laitières, 8 veaux, 6 cochons - pour faire place à son gendre Hendrik Ghysels, qui vendit à son tour la ferme à un Général de l'armée Hollandaise, Louis Tellio. L’exploitation agricole et la ferme furent mises en location pendant des années. En 1750 (date mentionnée au-dessus de l'entrée principale), des travaux de rénovation sont effectués et la ferme prend plus ou moins sa forme actuelle.
Hof-ten-Hout en 1777 - carte Ferraris
En 1885, les bâtiments deviennent la propriété du baron August Goethals, qui possédait également le château de Revelingen et dont la fille cadette, Valentine épousa en 1860 le comte Louis de Jonghe d'Ardoye (voir rubrique Promenade Ste-Gertrude). Par héritage, le château, les fermes et les domaines passèrent finalement aux mains de la famille de Jonghe d'Ardoye.
En raison de la situation isolée des fermes, les tenanciers constituaient une proie facile pour les brigands. Le fermier Jan Frans Van Achter, fut encore victime des brûle-pieds à la fin du XIXe siècle.
Pendant la guerre de 1914-1918, il faisait très calme. On n’apercevait que rarement un soldat allemand dans Rhode. On avait toutefois organisé des gardes de nuit pour protéger les champs et les cultures.
Pendant la guerre de 1940-1945, le comte Philippe avait aménagé dans son domaine, plus particulièrement dans les bergeries, un abri pour les villageois recherchés par l'ennemi. Après la guerre, des prisonniers de guerre allemands furent mis au travail dans la ferme Hof-ten-Hout. L'un d'eux ne voulait d’ailleurs pas retourner dans son pays natal par peur des Russes.
Tableau de Clarot en 1960
Le 31 décembre 1968, au cours de la soirée de réveillon, la ferme est détruite par un incendie. Le fermier Noël Van Lancker et sa famille se sont retrouvés sans abri et ont été contraints de rester temporairement dans un mobile-home. Le Comte André, de par sa formation d'architecte, a réussi à transformer endéans les six mois les porcheries situées côté rue (Hof-ten-Hout / Eikenbos) en habitation. A partir de ce moment-là, le fermier Noël y a résidé avec son épouse Georgette et leurs deux filles.
Sur le tableau de Clarot on peut voir le fermier Noël sur son tracteur Fendt vert, sa femme Georgette et Irma, sa mère, qui nourrissent les poules de la basse-cour. A cette époque, le fumier était encore au centre de la cour. En plus du lait, des poulets et des œufs, on pouvait également acheter du délicieux beurre salé.
Noël (1928-1994) était le dernier fermier actif à Hof-ten-Hout.
Un homme sympathique et ami des enfants : les enfants du quartier étaient toujours autorisés à monter dans sa charrette tirée par son tracteur. Il a repris le bail de ses parents Jules et Irma, originaires de Nokere.
Jules et Irma
Photo: C. Nekkebroeck
Photo: J.-P. Liebert
Ils furent les fermiers de Hof-ten-Hout de 1935 à 1960. La ferme et les champs étaient la « place to be » de la jeunesse des années 60. Dans l'espace situé au-dessus des étables, à côté de la chambre de l'ouvrier agricole, une zone avait été aménagée où les jeunes du coin allaient fumer leurs premières cigarettes. Dans les champs situés à côté de la ferme, on faisait des feux de camp. Au cours d'un été sec, dans la précipitation, Noël a un jour dû éteindre un feu de camp devenu incontrôlable.
Noël et Georgette
Le fermier Noël avec son inséparable casquette de « baseball ». Selon ses amis, il serait à l'origine du succès de ces casquettes en Belgique.
Le fermier Noël en conversation avec l'échevin Herman Wauters (milieu des années 1980) lorsqu'il a été élu « meilleur fermier » de tous les temps. À gauche, son frère Charles (1931-1988), qui dirigeait un magasin (matériel de jardinage, graines,..) dans la rue du Hameau. Louis, le cadet, était directeur à la papeterie Novarode.
La ferme en 1974 - Photo : Marcel vander Elst - colorisée artificiellement en 2022.
Hof-ten-Hout en 1960 - Source : Paula Louckx
Ensuite, le comte André a entamé la restauration de la maison incendiée. Avec l'aide d'ouvriers qualifiés de Rhode, il réussit à restaurer la ferme en respectant le style original. Un exploit...
Après le mariage du comte André avec la comtesse Brigitte en octobre 1970, la ferme Hof-ten-Hout est devenue leur domicile. Au cours de sa carrière professionnelle, le comte André a redessiné, entre autres, les plans du Palais de justice de Bruxelles qui avaient été brulées par les Allemands.
Photo aérienne de Hof-ten-Hout en 1977
Dans les années 1980, des fêtes de quartier étaient organisées (Hof-ten-Hout et Avenue des Pinsons) - notamment les "Houtenvinkfeesten" - qui, lorsqu'il pleuvait, se déroulaient dans la partie couverte de la ferme, gracieusement mise à disposition par le comte et la comtesse . Un quiz était organisé, suivi de l'élection de « Miss et Mister Houtenvink ».
Sur les photos ci-dessous, nous pouvons observer les enfants dans la charrette tirée par le tracteur du fermier Noël. Fred Vanderlinden s'occupe du quiz.
Source : Mimi Degelas et Christian Nekkebroeck
Source : Mimi Degelas et Christian Nekkebroeck
Quelques photos d'ambiance de la "houtenvinkfeest" au milieu des années 80
Le fait que la ferme ait conservé son authenticité et que les terres sont restées intactes à ce jour est dû à la famille de Jonghe d'Ardoye. Il n'y a plus de fermier ni de garde forestier.
La ferme Hof-ten-Hout est devenue un monument protégé en 1981 et se trouve toujours en zone rurale.
Parmi les chemins qui se croisent à hauteur des étables et de la grande entrée à l’arrière (nouvellement pavée en 2018 jusqu'au Kwadebeek), l’un d’entre eux va vers Waterloo (chemin des Anes, à l'origine appelé Elzenbosweg) et un autre (Hof-ten-Hout) part en direction de L’Hermite/Braine l’Alleud. Sur ce chemin se trouve la maison du garde-chasse. Il faut longer une pinède à main droite, plantée vers les années 50 par le garde-chasse Fons Goossens et son fils André. Vous arrivez ensuite à un petit chemin privé. Un portail métallique soutenu par deux solides pierres naturelles bleues avec une sphère au sommet, mène à la maison du garde (nr 82) et donne également accès à l’arrière au Château de Revelingen. C'est une grande maison, avec une tour de guet percée de trous d’hibou et toutes les fenêtres protégées par du fer forgé (conçu vers 1850 par l'architecte Jean-Pierre Cluysenaar). Avant la construction du chemin de fer (+/-1875), la route de l’Ermite était utilisée par les ouvriers qui allaient travailler à Braine-l'Alleud (en industrie), le chemin le plus court était à travers champs…
Photo: C. Nekkebroeck
Depuis l'installation d'une station d'épuration des eaux en 2018, le Kwadebeek a retrouvé une partie de sa pureté. Cette installation est située au bas de la rue des Crapauds.
Dans les années 1960 le Kwadebeek regorgeait de crapauds (crapaud accoucheur) et des lézards vivipares dans la zone marécageuse du « Elzenbroek ». Il y avait aussi un puits où la population locale venait chercher de l'eau (les raccordements au réseau public ont eu lieu vers 1930-35). Un peu plus loin, le Kwadebeek formait un petit étang avec une station de pompage qui envoyait l'eau à la Brasserie De Greef.